Dans le silence du col où les rochers au vent ne font pas obstacle, Dans les coins où personne n’avait pénétré Vivait, habitait un joyeux écho montagnard. Il répondait aux cris aux cris des hommes. Quand la solitude vous reste en travers de la gorge Et qu’un gémissement étouffé tombe presque sans bruit dans le gouffre, Cet appel au secours, l’écho le reprend, le reprend promptement L’amplifie, et l’emporte avec précaution dans ses mains. Ce n’étaient certes point des hommes gorgés de boissons enivrantes Car personne n’a entendu ni piétinements, ni hennissements Ceux qui sont venus pour mettre à mort, priver de voix les gorges vivantes, Et qui ont ligoté l’écho et qui l’ont bâillonné. Toute la nuit s’est poursuivie la farce sanglante et cruelle, Et on a piétiné l’écho, mais personne n’a entendu un son, Au matin, on a fusillé l’écho montagnard devenu muet, Et des pierres ont jailli, comme des larmes des rochers blessés.
© Michèle Kahn. Traduction, 1977