Oh, Vania, regarde un peu ces charlots, Et leur bouche comme un calicot, Et la peinture sur leur museau, Et leur voix de poivrot! Oh, Vania, c’est ton beau-frère, ce gars, Lui tout craché avec sa trogne d’alcolo Oh, regarde, mais regarde donc, Vania, Je mens pas, regarde ça! - Zina, touche pas au beau-frère! C’est pas le Pérou, mais c’est la famille! Et t’as oublié la peinture et la fumée Sur ta grosse bille! Pourquoi tu bavasses? À l’entracte, Zina, tu te carapates en bas. J’irai tout seul, si tu veux pas! Allons, Zina, remue-toi! - Oh, Vania, regarde ces nabots, Du vrai jersey leurs maillots, C’est pas ma boíte de rigolos Qui en ferait d’aussi beaux! Dis donc, Vania, tes bons copains C’est vraiment pas le gratin! Toujours blindés dès le matin, Toupurs pleins! - Mes copains, c’est pas des aristos, Mais pour la famille, c’est du costaud! S’ils boivent des cochonneries, C’est par économie! Mais dis-moi un peu, Zina, ton copain, Qu’on vient de virer de ton turbin, C’est au pétrole qu’il faisait le plein Ton petit pote, hein? - Oh, Vania, regarde ces perroquets! Ah! J’en peux plus, je hurle, ouais! Oh! Qu’il est beau, ce maillot, Vania, je le voudrais! À la fin du mois, pas vrai, Vania, Tu m’en ramènes un super bath; Pourquoi toujours "après" et "après"? Vania, je craque! - Zina, tu ferais mieux de la fermer! Ma prime du mois, on me l’a sucrée! Qui m’a dénoncé au contremaítre? Toi? J’ai lu la lettre. Et puis regarde-toi, Zina! Ca maillot, Si tu l’enfiles, t’auras l’air charlot! Il t’en faudrait des mètres carrés! Et l’argent, où je vais le trouver? Oh, Vania, les acrobates! Des malins, Oh, comme il cabriole, le galopin! Satikov, le chef d’atelier, ce matin Il galopait comme ce lapin! Ivan, quand tu rentres à la maison, Tu manges et tu t’affales sur le divan... Ou tu gueules quand t’es à jeun. Tu cherches quoi, Ivan? - Zina, me force pas à être grossier, Zina, tu cherches à m’offenser! Toi, tu les roules toute la journée, T’arrives, et hop, devant la télé! Alors comprends-moi bien, Zina, Je file dare-dare au bistrot du coin; Là-bas c’est plein de bons copains, Je suis pas seul quand je bois!                                
© Jean-Jacques Marie. Traduction, 1989