Sans traces ni interdits, cramant les pneus sur l’asphalte, Les voitures se ruent vers les banlieues hors du cauchemar des cités, Les fords, les lincolns, les cadillac, aussi encombrantes que des tanks, Et l’élégance des mercédès, des citroëns et des mustangs. Qu’on se le dise! Le jeu en vaut la chandelle! C’est l’annonce de la vendetta sanglante contre les villes. Foncez plus vite encore, sans griller les bougies, Et le carburateur et tout le fatras! La chaussée s’efface, Oh limousines, limousines, Deux splendides automobiles font deux taches au beau milieu. Comme liées par un câble qui s’amincit au point de rupture, Accélérateurs et pistons menacent de ne plus tourner rond. Qu’on se le dise! Le jeu en vaut la chandelle, Il suffit de s’arracher, de tout régler rubis sur l’ongle, Et en prime peut-être, il lui débitera un discours, En pianotant du klaxon et de tout le fatras. Ce ramassis de véhicules dissimule une rancœur contre toi, Ne perds surtout pas des yeux la limousine gris clair. En avant, regarde donc, départ! encore plus de risque et de foi! Ah tu traînailles, ce que tu lambines, limousine! Ils le savaient bien: le jeu en vaut la chandelle. Quels signes désormais klaxonner aux panneaux de publicité? Mais peut-être, peut-être a-t-il laissé tomber le fardeau De ses épaules ou de son capot ou de tout le fatras. Ah non! C’est la fourche du malheur, les aiguilles font le grand écart, Et tu n’es pas là, les autoroutes ne nous rapprochent-elles donc jamais? Regarde l’autre qui déboule en transes et c’est la septième qu’il enclanche! La limousine clair de gris a omis d’appuyer sur le frein. Est-ce donc la longue arrivée des rêves vides Ou la vendetta sanglante contre les villes. Elle a fini la cavalcade des roues et des ponts Et des cœurs ou de tout le fatras.
© Jean-Jacques Marie. Traduction, 1988